Chorégraphe aujourd’hui, ma vision de la situation

Chorégraphe aujourd’hui, ma vision de la situation


© Michal Grosicki

Quand j’ai commencé à chorégraphier, chacun(e) montait ses projets quand il était prêt, nous dansions les un(e)s pour les autres, nous nous invitions à présenter nos pièces, toujours courtes, dans des programmes partagés. Puis le temps des subventions est arrivé. Chaque chorégraphe a créé sa propre compagnie, en tant qu’auteur et directeur, et chacun(e) a défendu son travail en concurrence avec les
autres. C’est un résumé quelque peu rapide, mais qui correspond à ce que j’en garde comme souvenir et surtout qui m’amène à envisager la suite. Il est devenu l’usage de penser qu’un auteur = une compagnie. Il y a donc un glissement sensible qui s’est effectué et qui fait que le directeur et l’auteur sont les
deux facettes du même métier, du moins c’est ce qui semble la règle, celle qui va permettre une reconnaissance, qu’elle soit publique ou/et financière. (Nous parlons même des trois métiers du chorégraphe puisque celui-ci est souvent interprète dans ses propres pièces)
Les chorégraphes sans compagnie, travaillant à la commande ou de manière indépendante sont considérés comme des marginaux au pire, au mieux comme des auteurs « à part ».

Or, il me semble qu’il y aurait d’autres manières de se dire chorégraphe, de se penser auteur, que celle associée à directeur de compagnie.

Chorégraphier, c’est écrire des danses, c’est une manière d’organiser le temps, l’espace, les relations des humains entre eux et avec l’environnement, de gérer des qualités, de mettre en relation, de créer des univers….

Il serait donc possible, dans cette perspective, de rechercher des paradigmes différents que celui d’auteur/directeur pour reconnaître la place de l’auteur, voire de l’accompagner dans son cheminement.

Il serait alors sans doute intéressant de mener une enquête, des entretiens, des rencontres pour envisager avec divers chorégraphes, de quelle manière ils se sentent auteur, quelque soit leur activité.
Comment et pourquoi se perçoit-on chorégraphe lorsque l’on mène un atelier dans
une maison de retraite, un collège, …. ?

Le chorégraphe est-il celle ou celui qui produit une oeuvre ou celle ou celui qui œuvre de manière particulière, qui a un regard spécifique sur le monde ?
Qu’est-ce qui distingue sa manière de penser, d’agir, de concevoir, de construire, d’entrer en relation avec les autres ?

Du coup, est-ce qu’une œuvre est un produit ou une manière de vivre, une relation particulière au monde qui peut prendre des formes d’apparaître diverses, variées, complémentaires et toutes aussi indispensables et cohérentes les unes que les autres ?

En tous cas, en ces temps troublés, je pense qu’il est grand temps de réfléchir, de nous fédérer dans toute notre richesse pour envisager l’avenir avec créativité….

Micheline Lelièvre, coprésidente de Chorégraphes Associés.
15 août 2014

Leave a Reply