Danse et Verticalité, Intervention Antoine Le Menestrel

Danse et Verticalité, Intervention Antoine Le Menestrel


© Eberhard Grossgast

Débat de Nice 23/11/15

Antoine Le Menestrel est chorégraphe et danseur de la Cie Lézards Bleus.

Être créatif dans l’adaptation. Il se définit comme un voyageur en verticale, un folambule. Son mode de locomotion est l’escalade.
Un parcours : c’est un grimpeur de haut niveau qui participe à l’invention de l’escalade libre. Puis ouvreur de voies de compétition, il apporte à l’ouverture du spectaculaire et une dramaturgie révélé par les compétiteurs.
Il se libère de l’esprit compétitif et devient chorégraphe.
La recherche de l’énigme minérale l’a rendu gestuellement créatif.
D’abord, il joue dans les théâtres sur des décors différents qu’il construit et jusqu’à s’en affranchir. Ce chemin de dénuement le mène à l’environnement vertical, les façades. C’est la création d’une dizaine de spectacles de danse de façades en milieu urbain et naturel…

Les spectacles se nourrissent de mythologie verticale. Les territoires imaginaires : Roméo va rejoindre Juliette au balcon, le Petit Prince, Spiderman, Le Père Noël, personnages cultuels…
A chaque lieu correspond un spectacle : monument, rue piétonne, bâtiment…
Chaque spectacle est une recréation avec l’architecture et le contexte de la représentation (territoire politique). In situ In visu. Les passants assistent à chaque étape de la recréation. Repérage du support, apprivoiser la technique. Répétition générale.

L’architecture devient partition chorégraphique. Cette architecture lui renvoie un territoire imaginaire.
Dans la rue, il travaille sur la limite entre espace privé (les habitations, lieux de vie, de commerce…) et l’espace public. La frontière est son espace scénique.
Il est attaché aux limites et aux frontières pour y trouver une lézarde.

Arrivée sur un lieu : observation visuelle, écoute, touché. Ce n’est pas parce qu’un lieu est fragile qu’il l’évite, il utilise alors une technique de répartition de son poids sur les quatre membres. Il choisit les prises les plus solides en les faisant sonner, en les nettoyants. Il prépare une voie déterminée dans laquelle il improvise.
Faire appel à son intuition. Se poser devant: qu’est-ce que cette façade me raconte?
Ressentir les lignes de force, les points d’acupuncture, ce qui prolonge l’architecture.

Prise en compte de l’espace de visibilité des spectateurs (espace, contre-jour intéressant ou pas, floraison…). Cet espace peut être fixe ou déambulatoire. (Obstacle, rue passante à traverser, trottoir avec le regard en haut ! …)

Espace de sécurité: définitif (barrières Vauban) ou fluide (balises rouges et blanches avec un cœur dessus)
Certains territoires demandent des autorisations (bâtiment institutionnel). Pour obtenir ces autorisations administratives, une association forte avec l’organisateur est parfois nécessaire (travail de longue haleine). Pour d’autres spectacles, il ne demande pas d’autorisation de grimper mais la possibilité de se déplacer sur les façades. Passer d’un point A d’un côté à un point B plus loin! Ne pas laisser la porte ouverte à un non. Le Joker: en cas de refus, il frappe à la fenêtre en présence des spectateurs pour demander un passage créer une scène. C’est le canal poétique et relationnel, il n’y a que l’artiste qui peut le faire.

En général, il travaille seul, en journée. Il improvise avec le temps, avec le vent, avec le soleil – territoire cosmique. Il est toujours prêt à jouer, prêt à modifier le spectacle sous la pluie, s’engouffrer dans la fenêtre météo.

Il a besoin du regard des spectateurs pour exister, cette tension est une cordée émotionnelle. Il ne cherche pas à habiter les lieux, il est de passage telle une signature. Il donne l’échelle humaine dans l’espace architectural.
Il dit :  » je ne change pas le monde, mais je change le regard sur l’architecture »

Sa dernière création est pour le théâtre sur les 6 faces du cube débarrassé des pendrillons. Là il est chorégraphe, il redescend à l’horizontal. La thématique est inspirée de l’idéologie de l’Escalade. Il met l’accent sur la descente, profite de la gravité. On ne sait plus descendre. Il y a une gravité de l’altitude. Pourtant le sommet est une voie sans issue. Le partage est notre sommet.