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  • Une possible révolution des mentalités?

    Une possible révolution des mentalités?

    Le/la chorégraphe: sa place dans la culture aujourd’hui, son devenir…tant de questions se posent.
    Ce qui suit est né du questionnement autour de sa formation et de là, la réflexion s’est élargie.

    Au-delà et en parallèle à toutes les formations mises en place par l’AFDAS dans le cadre des droits ouverts par son statut d’auteur, ou de salarié, n’y a-t-il pas à envisager un autre type de formation?
    N’y aurait-il pas la possibilité de proposer des moments informels où cette formation se ferait sur la base de l’échange d’expérience?
    Je sais que l’on m’opposera toujours l’argument que le chorégraphe a déjà tellement à faire (voir le débat sur les 3 métiers du chorégraphe, auxquels s’ajoute bien souvent celui de responsable de compagnie) qu’il n’a plus de temps pour lui. Même sa formation est soumise à une démarche de rentabilité (formations techniques, de communication, administratives) puisqu’il/elle doit être polyvalent.

    Mais ce qui lui manque est un espace où il puisse échanger, mûrir, confronter ses réflexions à celles de ses pairs.
    Là intervient de nouveau un changement d’attitude. Il prendra du temps, certainement. Il faut donc mettre l’idée en chantier au plus tôt. Les chorégraphes s’isolent trop les uns par rapport aux autres.
    De nouveau, ce constat de l’individualisme de la profession!

    Mille raisons sont en cause dans cet état de faits mais les chorégraphes ne peuvent pas demander à l’institution d’évoluer si eux-mêmes ne lancent pas de grandes mutations concernant leurs approches professionnelles. Ils veulent devenir plus visibles, être pris en considération. Allons-y!

    Une des manières de l’être est de se réunir, de partager des moments de réflexion, de montrer leur engagement et leur détermination à faire changer le regard sur la profession et sur la danse en général.
    La danse est si souvent mise en sous-catégorie de la musique… Encore récemment, le CNSMDP en a fait les frais. Le mal a été réparé, semble-t-il, mais ce qui transpire de cette histoire est symptomatique.

    Revenons à la formation continue du/de la chorégraphe. Et si le syndicat Chorégraphes Associés devenait ce laboratoire informel où les idées s’échangent, se confrontent, mûrissent, s’élaborent?
    Si, en plus des débats et des rencontres que syndicat Chorégraphes Associés met de plus en plus souvent en place, d’autres temps étaient dédiés à l’acte créateur et aux chemins empruntés par le/la chorégraphe?

    Questions telles que: le point de départ d’une pièce, le choix de l’espace où elle est destinée à exister, le nombre et les langages artistiques des interprètes, écriture complètement chorégraphique ou écritures de plateau qui s’enlacent…. Bien d’autre thèmes peuvent être abordés, mais sont un peu plus éloignés du sujet qui nous intéresse aujourd’hui: la formation continue.

    L’évolution à mettre en chantier est énorme. Il faut que les chorégraphes s’appuient sur une structure qui leur permette ce travail commun. Le syndicat Chorégraphes Associés existe. Il est à la disposition des chorégraphes adhérents. Il représente tous les chorégraphes dans la diversité des esthétiques et des approches. Ceux qui y sont engagés souhaitent de toutes leurs forces que d’autres artistes chorégraphiques les rejoignent.
    La maturité des créateurs se traduit aussi par une capacité à déplacer les obstacles, à ne pas subir avec fatalité des frilosités institutionnelles, à faire avancer ce qui leur tient à cœur.

    Oui, des outils ont été créés, le CND en est un exemple. Mais il a été mis en place par l’institution!

    A nous de nous emparer de notre profession en proposant des approches complémentaires à ce qui existe déjà. Nous sommes les premiers à pouvoir identifier ce qui nous manque, non?
    Un premier pas serait déjà d’adhérer au syndicat Chorégraphes Associés toujours plus nombreux. Le nombre fait la force. La reconnaissance de notre poids nous donnerait des arguments pour tous les chantiers à mener.

    Isabelle Magnin, membre du Conseil d’Administration de Chorégraphes Associés
    Avril 2014

  • Interrogations sur « Est-ce qu’un chorégraphe peut être à la direction d’un équipement culturel pluridisciplinaire? »

    Interrogations sur « Est-ce qu’un chorégraphe peut être à la direction d’un équipement culturel pluridisciplinaire? »

    Quelques interrogations qui pourraient nourrir le débat programmé à Avignon en juillet 2014:

    Par son vécu et son mode de travail, le/la chorégraphe ne crée-t-il/elle pas en partie cet état des choses?

    Je m’explique :
    – Un chorégraphe travaille presque toujours seul sauf quand il est à la direction d’un CCN. Ce qui représente un tout petit groupe au sein de la profession.
    – Se sentirait-il prêt à aborder un travail d’équipe pour faire avancer un projet où toutes les formes artistiques sont représentées?
    – Pourrait-il construire une programmation en partenariat avec les responsables administratifs de la structure qu’il/elle aurait en charge?
    – Le/la chorégraphe a du mal à se penser « cadre » et donc, être à l’initiative de projets et à la tête d’une équipe qui ne soit pas seulement artistique et technique.
    Comment dépasser cet « empêchement » pour passer de l’autre côté?

    Par cette position un peu « en retrait » d’une part, et par son manque d’implication dans les engagements syndicaux et les grands débats de la profession de l’autre, le/la chorégraphe ne donne-t-il/elle pas l’image d’une personne ayant choisi un chemin solitaire et surtout individuel?
    Il y aurait vraiment à engager un changement de positionnement à ce niveau.

    Le syndicat Chorégraphes Associés milite pour cette évolution. Nous devenons plus « visibles » et plus représentatifs. Mais c’est aussi sur ce terrain là que nous élargissons notre cercle d’influence, me semble-t-il.
    Il faut que les chorégraphes mesurent qu’ils doivent renforcer leur impact. Le syndicat Chorégraphes Associés est un des points d’appui. Y en a-t-il d’autres? Faudrait-il en inventer d’autres? Devons-nous élargir notre champ d’action?

    Tous ces facteurs ne sont-ils pas assimilés par les institutions? De ce fait, on ne suggère pas aux chorégraphes que la fonction leur est accessible.
    Par ailleurs, revendiquent-ils, ont-ils revendiqué cette place-là?
    Quels sont les chorégraphes qui ont fait acte de candidature à de tels postes?

    C’est très récemment que ce possibilité s’est révélé. Parce que la pensée avance, que la structuration du métier progresse et que, peut-être, une réflexion nouvelle est engagée sur la place d’un « corps sensible et expressif » dans le monde d’aujourd’hui?
    Tout ceci est lié à la place laissée à la danse, non?
    Avec une pensée en mutation, ou en évolution, à nous de nous en emparer.
    La société a toujours un temps de décalage (ou plus?).

    Isabelle Magnin, membre du Conseil d’Administration de Chorégraphes Associés

    Avril 2014

  • Lettre ouverte à la Ministre de la Culture

    Lettre ouverte à la Ministre de la Culture

    Nous avons pris connaissance de la convention signée pour l’éducation artistique et culturelle entre Total et le ministère de la Culture. Nous sommes surpris de voir un acteur majeur du CAC40 participer aux choix d’actions à mener dans les domaines de l’Art et de l’Education.

    Si certains voudraient y voir l’élan citoyen d’un géant transnational, cette action de communication masque en réalité un scénario que nous avons trop souvent vu se répéter : l’Etat ouvre la porte aux financeurs privés pour tenter d’écrire une histoire publique – privée.

    Cette opération de communication offre à Total un nouveau label de moralité et de civisme à bon compte, en même temps qu’il crée un mouvement des plus inquiétants : après l’éducation artistique, la création ? Et bientôt l’enseignement ? La santé ? La justice ?

    Nous sommes en colère de voir le ministère permettre qu’une entreprise privée contrôle par le biais de sa fondation le contenu des actions menées, surtout quand cette entreprise a tant de fois démontré son souci de l’intérêt général…

    Nous sommes consternés d’assister à une opération de communication d’un géant du pétrole validée par le ministère de la culture qui n’engage plus les moyens nécessaires à sa politique ; une opération qui porte sur 0,013 % des bénéfices du groupe et qui lui ouvre de nouveaux droits à réductions fiscales (2,4 millions sur 4), en sus des millions d’euros déjà récupérés grâce au crédit d’impôts recherche (70 millions) et au crédit d’impôt compétitivité (20 millions).

    Les équipes et structures professionnelles fragilisées par les resserrements budgétaires successifs, doivent-elles considérer cet argent comme une manne salutaire leur permettant de mener leurs missions d’intérêt général ?

    C’est en établissant un impôt plus juste et équitable pour les particuliers et les entreprises, en stoppant la fuite des bénéfices dans des filiales off-shore, en taxant les transactions financières, comme l’avait promis le Président de la République lorsqu’il n’était que le candidat Hollande, que l’Etat pourra jouer son rôle et garantir équilibre des territoires, justice sociale et démocratie culturelle. Certainement pas en abandonnant ses prérogatives au bénéfice de l’image de transnationales.

    Conseil National du Synavi

    Février 2014

  • L’amateur et le professionnel dans la création artistique

    L’amateur et le professionnel dans la création artistique

    En ces temps où il est devenu assez commun de partager des projets entre amateurs et professionnels, quelques réflexions me sont venues à l’esprit.

    La première touche bien sûr à la différence que l’on peut effectuer entre les deux termes. Il est certain qu’il y a certains endroits de frontières incertaines entre les deux postures, néanmoins, on pourrait avancer sans trop se risquer que l’amateur est celui qui aime une certaine pratique (productive ou non d’un objet) et le professionnel, celui qui dédie sa vie à son art, à sa pratique et en gagne sa vie.

    Ceci n’est pas anecdotique. Le professionnel se consacre à son art, cela veut dire que ses préoccupations tant créatrices que matérielles sont orientées vers la réalisation d’un projet et si possible la rémunération correspondante. C’est un travail et il a une valeur, donc potentiellement le créateur reçoit une somme correspondant à cette valeur. Dans le domaine de l’art, rien n’est plus incertain que la vente de sa création et comme le dit le sociologue Pierre-Michel Menger, l’artiste est celui qui a une grande tolérance à l’incertitude ! Non d’ailleurs qu’il apprécie celle-ci, mais elle est, généralement, vécue comme une des contraintes de la profession. Par ailleurs, cette incertitude, tant créatrice que matérielle peut aussi générer une manière de s’intégrer dans le monde social, de s’envisager comme individu civique et influer sur, ou orienter un processus créatif.

    L’artiste amateur n’a, bien sûr, pas à se poser ces questions. La création ne lui est pas forcément plus facile pour autant, mais il n’est pas contraint par la nécessité et n’a pas de pression de temporalité. La notion de plaisir est prédominante à celle d’urgence vitale. Son projet lui appartient, il le partage quand il le souhaite ou quand il est convié à le faire.

    La difficulté pour moi commence au moment où le créateur amateur et le professionnel se rencontrent dans un projet.
    Je parle bien de deux créateurs. Pas d’un créateur professionnel qui intègre des amateurs dans sa création ; en principe il sait gérer la situation, ou du moins l’envisager en connaissance de cause et sait qu’attendre des intervenants.

    Un créateur amateur qui passe commande à un professionnel, se met dans une situation d’acheteur, donc la relation est en principe claire….
    Donc deux créateurs élaborent un projet commun, l’un des deux est professionnel, l’autre amateur. Et là, pour moi commence une vraie difficulté. Elle ne réside pas dans les compétences artistiques, chacun à les siennes et techniquement le niveau peut être tout à fait le même. C’est au niveau du projet que l’investissement est à mes yeux différent. L’artiste qui consacre sa vie à la création a des exigences bien spécifiques. Un créateur amateur aime ce qu’il fait, il propose ce qui lui fait plaisir.

    Bien sûr un créateur professionnel est quelque part dans le plaisir, mais quelque part seulement. Créer serait plutôt interroger, l’objet d’une création serait de questionner, de poser des jalons, ce serait une étape sur un chemin. Ce n’est jamais une fin en soi, c’est un moment d’un parcours de vie, un moment où une pensée, une image, un paysage se dépose, se construit. C’est un travail de soi, sur soi, en soi, et l’incertitude toujours éprouvée du partage de sa création avec les autres.

    Car une création n’existe qu’avec, par, le regard de l’autre. C’est cela aussi la fragilité et la richesse du créateur : la place de l’autre. L’idée d’ailleurs n’est pas de plaire à l’autre, mais d’offrir une vision, une position, un parti-pris dont l’autre s’empare et qui lui appartient et qui finalement ne nous regarde pas.

    C’est la notion d’œuvre que j’interroge ici :
    ce qui fait œuvre, c’est la proposition que l’on fait, en tant que créateur et dont l’autre fait sa propre histoire.
    C’est cette fragilité qui donne aussi son épaisseur à la création :
    en ce qui me concerne, une proposition chorégraphique n’existe qu’une fois en public, donc à chaque représentation différemment. C’est là sa richesse, sa faiblesse, la part qui m’échappe et qui pourtant est indissociable de la création.
    Peu importe ce qu’en fait le spectateur. Il est là avec son histoire, son humeur…. En toute humilité je lui offre mon point de vue, ma proposition et quelque chose advient… une sorte d’alchimie qui ne m’appartient que dans ce partage.
    Alors le plaisir est celui d’avoir une proposition, la plus en adéquation avec soi-même, ses convictions, ses visions pour pouvoir les soutenir, les porter au regard des autres.

    A quel endroit est le « travail », l’engagement du créateur amateur ? Et à quel endroit est-il travaillé, quand on sait que ce n’est pas son métier ?
    Où est son exigence, sa recherche, son questionnement pour faire évoluer, avancer son œuvre, quand on sait qu’il est occupé par d’autres compétences ?

    C’est une frontière que je trouve douloureuse à vivre dans une relation entre ces deux créateurs : il y a un endroit de dialogue qui n’existe pas ou qui s’il existe n’est pas de la même importance vitale.
    C’est au niveau de la prise de risque qu’il y a un espace inconfortable entre les deux.

    A l’heure d’aujourd’hui, avec les moyens technologiques à notre disposition, tout le monde peut se dire, se vivre artiste (on peut faire des photos, des films, imprimer des livres, créer ses musiques). Mais cela fausse aussi la connaissance du travail de l’artiste professionnel. Jamais comme aujourd’hui nos métiers de créateurs ont été si peu connus.
    Alors comment travailler en collaboration entre un professionnel et un amateur ?
    Comment préservez nos spécificités, échanger, s’apporter mutuellement et en même temps reconnaître nos différences, nos nécessités, nos vies différentes ?
    La question est ouverte….

    Micheline Lelièvre, membre du CA de Chorégraphes Associés

    Mars 2014

  • Compte rendu du débat au BIS de Nantes, 22 janvier 2014

    Compte rendu du débat au BIS de Nantes, 22 janvier 2014

    Débat et Atelier au BIS 2014

    Créateur aujourd’hui, quels enjeux, quels moyens, quelle visibilité ?

    Intervenant Patrice Rabine, administrateur du Théâtre Folle Pensée
    Présents Brigitte Dumez, Isabelle Magnin, Michel Lestrehan, et Sosana Marcelino pour Chorégraphes Associés


    • Introduction

    Brigitte Dumez, co-présidente présente Chorégraphes Associés et les intervenants présents à la table. Elle poursuit par la lecture du texte d’introduction écrit par Micheline Lelièvre :

    La place du créateur dans la société est une place à sans cesse interroger.
    Le créateur est celui qui explore de nouveaux horizons, et il vit dans une société qui évolue, qui se transforme et dont il fait partie en tant qu’être social.
    Le monde d’aujourd’hui a bougé très vite et le rapport au monde de la culture et à ses créateurs aussi.
    Prenons un exemple simple avec l’apparition du numérique : tout le monde peut faire des photos, de la musique, faire des films…. Cela ne fait pas pour autant de tout un chacun un créateur, mais cela bouge la place de celles et ceux qui en font leur gagne pain, leur métier, et cela bouge aussi la place que la société leur accorde, leur reconnaît….
    La question qui se pose aujourd’hui est celle de la spécificité du créateur, comment le penser pour qu’il soit reconnu comme membre contribuant à la vie sociale par le biais de sa création ?
    Par corrélation, cela pose la question de savoir si un créateur est un travailleur, et en ce cas, comment définir son travail et donc sa valeur…
    Un créateur n’est pas quelqu’un d’isolé dans la société, même s’il le souhaite éventuellement, il est relié à un monde qui vend des œuvres ou qui les achète, à un public qui vient voir un spectacle. Il y a donc toute une économie autour du créateur.
    Par ailleurs, malgré tous les moyens dont nous disposons et qui sont à la portée de chacun, ce qui me frappe, c’est la totale méconnaissance du public de ce qu’est un créateur, de ce qui fait le cœur de sa vie, de son engagement…..
    Alors peut-être y aurait-il deux chantiers à mener, l’un qui permettrait de rendre visible, compréhensible, et en tous cas reconnu comme une manière particulière de travailler, le champ du créateur, et l’autre qui serait de réfléchir à la valeur du travail du créateur, comment offrir une rémunération à ce type de travail difficilement identifiable et donc lui donner une sorte de reconnaissance sociale, sociétale…..
    Voici les quelques points qui pourraient être un point de départ à une réflexion sur « le créateur aujourd’hui, quels enjeux, quels moyens…..


    • Intervention de Patrice Rabine

    « Je suis administrateur d’une compagnie de théâtre. J’accompagne des artistes de théâtre sur le versant de la production et seulement sur ce versant-là. Je n’interviens pas sur la qualité du geste artistique, encore moins sur la place que les artistes entendent occuper.

    On me demande de limiter mon intervention à une vingtaine de minutes. J’aurai, par conséquent, seulement le temps de vous livrer cinq clefs de lecture, cinq entrées polémiques dans la vie quotidienne d’une structure de création artistique.

    1/ LA REMISE EN CAUSE DE L’INTERMITTENCE DU SPECTACLE AGRESSE VIOLEMMENT L’ARTISTE

    En 2012, lorsque j’ai rédigé une contribution sur l’intermittence du spectacle pour le Sénat, mon objectif principal était de démontrer que la Cour des comptes s’était discréditée en produisant à propos de l’intermittence un rapport partisan et peu rigoureux. Je le faisais en lien étroit avec la CIP-IDF.

    Les contraintes imposées par la loi à la Cour des comptes sont en effet définies par la Constitution française (Article 47-2) :

    – elle doit évaluer les politiques publiques au regard de l’utilité générale (ce qui, en toute logique, devrait inclure, par exemple, les externalités positives),

    – elle doit produire des avis « Réguliers et sincères » et donner une « image fidèle » au regard des règles comptables.

    Sur ces deux contraintes, la Cour des comptes n’a pas eu dans le dossier intermittents la rigueur attendue. Quand le DG de l’Unédic avoue devant l’Assemblée nationale qu’il n’a pas de vision comptable des recettes, évalue à seulement 300 millions d’euros l’économie réalisée si on transférait les intermittents au régime général ; quand deux ministres désavouent la Cour des comptes devant l’Assemblée nationale… on comprend que nous sommes arrivés à un moment de bascule.
    Comment cela se traduira-t-il lors des négociations paritaires sur les annexes 8 et 10 ? Je n’en sais rien, je ne suis pas du tout optimiste.

    2/ L’ARTISTE ET LA CRÉATION ARTISTIQUE SONT AU CŒUR DES INDUSTRIES CULTURELLES ET CRÉATIVES, AU CŒUR DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE

    Plusieurs études très solides ont été publiées en 2013 et 2014.

    > En avril 2013 : le « Rapport d’information sur les conditions d’emploi dans les métiers artistiques » publié par la Mission d’information commune de l’Assemblée nationale.
    > En novembre 2013 : « 1er panorama des industries culturelles et créatives. Au cœur du rayonnement et de la compétitivité de la France », réalisée par Ernst and Young et France Créative
    > En décembre 2013, « Acte II de l’exception culturelle : l’ère de l’industrialisation ? », réalisée par NPA Conseil et l’Essec (École supérieure des sciences économiques et commerciales).
    > En décembre 2013 : « L’apport de la culture à l’économie en France », réalisée conjointement par L’Inspection Générale des Finances (IGF – Ministère de l’Économie et des Finances) et L’Inspection Générale des Affaires Culturelles (Ministère de la Culture).
    > Début janvier 2014 : « Quelle indemnisation chômage pour les intermittents du spectacle ? Modélisation et évaluation d’un régime alternatif », réalisée par Mathieu Grégoire et Olivier Pilmis (CNRS, CURAPP, CSO Université de Picardie).

    Toutes ces études vont dans le même sens : elle donne un contenu scientifique à ce nouveau regard porté sur la culture et l’intermittence du spectacle. Premier constat : la culture est un des secteurs les plus dynamiques de l’économie française, en terme de chiffre d’affaires comme en terme d’emplois. Les externalités positives qu’elle induit sur les autres secteurs d’activités sont considérables. Deuxième constat : l’intermittence du spectacle constitue un modèle de flexi-sécurité inventif et parfaitement viable. Un modèle particulièrement bien adapté aux contraintes économiques d’aujourd’hui, puisqu’une partie croissante de l’économie adopte une logique de projet.

    3/ L’ARTISTE EST STRUCTURELLEMENT VASSALISÉ

    – Comment le créateur pourrait-il jouir d’une réelle liberté de création alors qu’il est structurellement vassalisé ? C’est une question centrale, déterminante. Il n’existe pas de réseau labellisé de compagnies (le MCC ne reconnaît pas la Compagnie conventionnée comme label national), alors qu’il en existe plusieurs du côté des institutions nationales et des structures de programmation et de diffusion. Cette situation crée un déséquilibre structurel qui vassalise et entrave les compagnies. Nous suggérons que, face aux réseaux labellisés des institutions nationales (Théâtres nationaux, Centre dramatiques nationaux, Scènes nationales, Scènes conventionnées, Scènes de territoire) soit mis en place des réseaux labellisés de même nature pour les compagnies (Compagnies nationales en région, Compagnies conventionnées, Compagnies de Territoire, Compagnies émergentes). Nous déclarons nécessaire le rééquilibrage entre la création et la diffusion, entre le créateur et le programmateur.

    – Pourquoi ne reconnait-on pas aux équipes artistiques et aux compagnies le droit de se développer ?

    – Comment enrayer la confiscation des outils de production et des aides publiques par les institutions nationales au détriment des compagnies ?

    – Comment enrayer la confiscation des aides du MCC par l’Île-de-France au détriment des autres régions ?

    – Comment limiter la diffusion croisée entre institutions nationales, qui exclut de fait les spectacles produits par les compagnies ?

    – Comment mettre un terme à la généralisation de l’effet blockbuster ? Autrement dit à l’excès de programmation construite autour d’un gros budget, de gros revenus et d’un casting prestigieux basé sur une ou deux têtes d’affiche parisienne du théâtre, de la télévision ou du cinéma.

    4/ LA FIN DU FINANCEMENT CROISÉ DES COMPAGNIES PAR L’ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES SIGNERAIT LA FIN DES COMPAGNIES

    L’article 2 de la loi MAPAM prévoit la possibilité pour l’État de déléguer ses compétences à une collectivité ou à une communauté qui en ferait la demande. Le délégataire agirait au nom et pour le compte de l’Etat. Cette délégation ainsi que le souhait exprimé par la Région Bretagne de la mettre en application pour la culture rendent possible le transfert au Conseil régional des compétences et des crédits d’intervention de la DRAC Bretagne.

    Ce qui pourrait avoir comme conséquence un affaiblissement de la présence de l’État ; dans certains cas, son retrait. La prédominance de l’État a permis de construire pas à pas des accords et des dispositifs avec les collectivités territoriales. Elle a permis de mettre en place des financements croisés, gages de libertés, d’audaces, d’inventions.

    Il n’est pas certain que la Région cheffe de file puisse jouer auprès des autres collectivités le rôle de locomotive joué par l’État depuis 1981. Il n’est pas certain que le financement croisé des compagnies par l’État, la Région, le Département, la commune survive à cette délégation. Aujourd’hui chacune de ces quatre institutions politiques apporte un quart de leurs ressources aux compagnies.

    5/ LA PLACE DE L’ARTISTE EST OCCUPÉE EN MAJORITÉ PAR DES HOMMES

    Contrairement aux idées reçues, la culture et les arts du spectacle en France, sont très en retard en termes d’égalité femmes/hommes.

    En 2011, en France :

    – 81,5 % des postes dirigeants de l’administration culturelle sont occupés par des hommes
    – 75 % des théâtres nationaux (dramatiques et lyriques) sont dirigés par des hommes
    – 92 % des théâtres lyriques en région sont dirigés par des hommes
    – 96 % des opéras sont dirigés par des hommes
    – 70 % des centres chorégraphiques nationaux sont dirigés par des hommes
    – 85 % des centres dramatiques nationaux sont dirigés par des hommes.
    – 70 % des compagnies dramatiques subventionnées par le Ministère de la Culture sont dirigées par des hommes.

    En 2012, sur 33 CDN, 1 seul est dirigé par une femme.
    La part des femmes ne dépasse 40 % que dans un seul type d’établissement : les centres dramatiques régionaux dirigés à « seulement » 57 % par des hommes.

    0 femme chef d’orchestre programmée en 2011/2012 dans l’Orchestre national de France, l’Orchestre national de Lille, l’Orchestre national de Lorraine, l’Orchestre national du Capitole à Toulouse.


     • Intervention de Michel Lestréhan

    Présentation de sa cie + la gestion en collectif du « Garage » à Rennes.
    Pouvoir créer entre la France et l’Inde représente une valeur de fond malgré les difficultés à avoir plusieurs casquettes pour gérer la diffusion, les coproductions, les visas…
    Cela ne remet pas en question les temps de création.
    Il est nécessaire de se former pour être capable d’évoluer dans les domaines structurants comme la communication…

    • Intervention de Sosana Marcelino

    Présentation de sa cie à travers la Lorraine, région frontalière permettant des échanges avec le Luxembourg et l’Allemagne. Les accords passés entre cette région et d’autres régions à l’étranger permettent la mise en place de projets au niveau européen et international (Pologne, Chine). L’enjeu est de pouvoir apporter le point de vue du créateur dans d’autres cultures éloignées, de les confronter à leurs propres valeurs et de permettre une transmission à ceux qui sont demandeurs sur place (écoles, universités…)…

    • Intervention d’Isabelle Magnin

    Présentation de sa cie installée dans le Var. Question autour du temps passé à la conception du projet qui n’est jamais pris en considération. Pour l’intermittent, le temps passé à l’élaboration est celui du chômeur, cela pose question sur comment la création est elle réellement soutenue.
    Présentation d’une dynamique interdisciplinaire ayant réactivé un collectif, actuellement une trentaine de cies soutenues au niveau de la gestion par des financements croisés, un réel outil de mutualisation…

  • Les 3 métiers du chorégraphe – Suite

    Les 3 métiers du chorégraphe – Suite

    Nous avons déjà écrit à ce sujet (article consultable ici) et déterminé que l’écriture, la direction des répétitions et l’interprétation sont les 3 champs d’action du chorégraphe. Selon la production et le cadre de la création, le métier du chorégraphe peut prendre plusieurs formes, plusieurs statuts et plusieurs rémunérations.

    Nous allons plus loin et proposons une grille de rémunération concernant ces 3 aspects de notre métier.


    1. chorégraphe auteur

    Il écrit et utilise pour cela tous les supports possibles au 21è siècle (partition, vidéos, logiciel, texte…). L’écriture peut se faire avant ou pendant les répétitions (parfois pendant les représentations). L’auteur est concepteur/créateur d’une chorégraphie; il est rémunéré en droits d’auteur et parfois quand l’écriture se fait en même temps que les répétitions, il peut être salarié par la production.


    2. chorégraphe encadrant des artistes

    Souvent, il dirige le travail d’une équipe artistique mais Il n’est pas forcément l’auteur de la pièce. À contrario, il arrive que l’écriture et les répétitions se trament de façon simultanée. Pour cette fonction le chorégraphe est cadre, car il intègre l’équipe dirigeante et assume les responsabilités dues à sa charge. Le chorégraphe salarié a un lien de subordination avec celui qui l’emploie. Il peut lui-même diriger des danseurs et est de fait, assujetti à des horaires de travail. Pour cela, le chorégraphe travaille (avec un répétiteur ou non) un certain nombre de jours, selon la production et la durée de la chorégraphie.

    Le syndicat Chorégraphes Associé.e.s opte pour un salaire de cadre débutant à un minimum de 150€ bruts/ jour.


    3. chorégraphe interprète

    C’est le cas le plus simple et le plus complexe à la fois. Puisque l’auteur crée son propre rôle, il faut bien, dans cette situation aussi, distinguer en amont de la production le temps relatif à l’écriture, celui de la répétition et celui du jeu. Il lui arrive aussi d’être interprète dans des créations partagées (films, vidéos, comédies musicales…)

    Il existe une grille de salaires pour l’artiste chorégraphique qui varie selon la convention collective utilisée par l’employeur.

    Il convient que le salaire minimum du chorégraphe-danseur soit majoré de 20%, car avant et après la représentation, c’est encore le chorégraphe (et pas le danseur) qui procède à des ajustements sur l’éclairage, le décor ou le costume…


    Ces 3 métiers du chorégraphe sont donc distincts, bien que la plupart du temps le passage de l’un à l’autre se fasse sur une même création.

    Afin que chaque chorégraphe trouve son cadre de travail et sa juste rémunération, le syndicat Chorégraphes Associé.e.s affirme auprès des organisations professionnelles et des institutions, son attachement à cette diversité des métiers de l’art chorégraphique.

    Chorégraphes Associé.e.s demande à tous les chorégraphes de déclarer leur activité autant que faire se peut dans chaque catégorie d’emploi. Il souligne la diversité de nos champs d’actions et demandent à ce qu’ils apparaissent, y compris sur une même création, notamment dans les budgets prévisionnels.

  • De quel Centre Chorégraphique National rêvons-nous ?

    De quel Centre Chorégraphique National rêvons-nous ?

    « Voici mon retour, sans doute tout à fait personnel et subjectif du premier moment de rencontre à Marseille autour de la question d’imaginer le centre chorégraphique de demain.

    Ce qui m’a frappée c’est combien les CCN sont vécus comme un lieu de privilèges, des lieux coupés du terrain. Le premier pré-requis pour même imaginer une autre manière d’habiter ces lieux est véritablement le souhait profond que les durées des mandats des chorégraphes dirigeant ces lieux soient respectés et limités. Les abus récurrents sont légions et il faut dire qu’avec un certain Pavillon Noir, les compagnies régionales ont de quoi être contrariées!

    Tout les présents s’accordent à reconnaitre la richesse de la vie de la danse dans les territoires, le travail colossal effectué par les uns et les autres, les porteurs de projets, les porteurs de lieux et la non-reconnaissance de ce travail profond au profit de vitrines avec d’indéboulonnables directeurs, totalement coupés du terrain. Donc finalement la discussion a plutôt porté sur la question de la reconnaissance de ce travail souterrain, mais profond, militant, passionné.

    Il est  grand temps que les directrices et directeurs de CCN partagent leur outil, mais aussi leur écoute de ceux qui œuvrent pour la danse autour d’eux, quelque soit leur taille car tous contribuent à l’avenir de notre Art! »

    Micheline Lelièvre

    membre du CA de Chorégraphes Associés


    Suite à cette réflexion à Marseille, Philippe Madala nous fait suivre les liens suivants:

    Repères n°8 : Les principaux réseaux et programmes financés par le ministère de la culture (création artistique), téléchargeable ici

    – ou à partir de cette page

  • Disparition d’Alain Buffard

    Disparition d’Alain Buffard

    Communiqué de presse, le 22 décembre 2013

    C’est avec une grande tristesse que Chorégraphes Associés apprend la disparition d’Alain Buffard.

    Interprète de talent avec Brigitte Farges, Daniel Larrieu, Régine Chopinot ou Philippe Découflé, il s’était lancé avec intelligence dans la chorégraphie.

    Ses pièces resteront des moments de l’histoire de la danse.

    C’est un chorégraphe qui restera dans nos mémoires.

  • Presse : Cogitations chorégraphiques au Studio 164, 2013

    Presse : Cogitations chorégraphiques au Studio 164, 2013

    article de Valentin LAGARES, sur la rencontre à Marseille 17/11/13

    Dans le cadre de tournées effectuées à travers l’Hexagone, cette organisation syndicale tente de mutualiser les questionnements de terrain prégnants. Une démarche globalement fructueuse le 17 novembre au Studio 164 de la compagnie Geneviève Sorin. Quelques interventions ont hélas semblé très égocentriques, voire virulentes au point de paraître irrespectueuses de l’auditoire.

    Parmi les réflexions néanmoins constructives, le départ de Frédéric Flamand du Ballet national de Marseille (BNM) a permis d’esquisser un « centre chorégraphique national de l’avenir ». A notamment été soulignée « l’obligation non respectée » par des directions « préhistoriques » de CCN refusant de passer la main après un certain temps.

    Autre sujet : les interventions chorégraphiques en milieu scolaire. Outre une alerte sur les réductions des budgets dévolus à ces initiatives, a été rappelée la difficile articulation du binôme institutionnel Éducation nationale/Culture. Au-delà d’un utile partage d’expériences, cette rencontre a insisté sur une « nécessité vitale de se regrouper en réseaux informels » face à des horizons culturels et artistiques très incertains.

    VL

    Vu et entendu le 17/11, Studio 164 / Geneviève Sorin

  • Rencontre au BIS de Nantes

    Rencontre au BIS de Nantes

    DEBAT

    Créateur aujourd’hui, quels enjeux, quels moyens, quelle visibilité?

    Mercredi 22 janvier 2014 de 14h30 à 16h00

    Rencontre organisée par Chorégraphes Associés à Nantes
    Cité des Congrès de Nantes
    Salle : J
    (horaires et salles sous réserve de modifications)

     

    Avec cette question, il s’agirait de mettre en lumière les conditions auxquelles le créateur d’aujourd’hui se trouve confronté, d’analyser les particularités de celles-ci, leur rapport au politique et au social : quelle place a le créateur dans la société et quelle place pourrait-il prendre?

    A la lumière à la fois d’un  témoignage de chorégraphe, mais aussi de spécialistes de l’analyse politique et sociale, nous examinerons ce qui fait la spécificité du créateur, de l’artiste dans son rapport aux autres, qu’il s’agisse de ses pairs, du public ou des acheteurs/producteurs de spectacle.

    Une fois cet état des lieux partagé, nous tenterons d’imaginer comment prendre en main l’avenir et  valoriser cette  place de créateur.

    Pour amorcer et ouvrir l’espace de réflexion, nous souhaitons inviter un chorégraphe, un sociologue et un administrateur.

    Ils nous feront part de leur expérience et de leurs observations. Celles-ci serviront de support à l’échange avec les participants à cette rencontre.

    IMPORTANT > Cette année, toutes les inscriptions pour les ateliers s’effectueront sur le site Internet des BIS, à compter du lundi 20 janvier. Aucune inscription sur place. Voila le lien pour inscription ici


    dans le cadre dubis_2014

    Intervenants (sous réserve)
    Patrice Rabine, administrateur du théâtre de Folle Pensée à Saint Brieux,
    Olivia Grandville, chorégraphe

    débat_banderoleDébat organisé lors du BIS 2012 © DR